Philippes CARPENTIER, de Beaufort
(AD59, B1736, folio 103)
En 1524, Prs de Noyelle-Vion, plusieurs compagnons
de guerre quitent un cabaret aprs y avoir beaucoup consomm. LĠun dĠeux,
Philippes GOURDIN sĠallonge prs dĠune haie et sĠy endort. Un de ses compres,
Pierre DU PENIN le rveille brutalement, mais Philippes GOURDIN se fche et
sort son pe avec laquelle il menace Pierre DU PENIN et le suppliant Philippes
CARPENTIER. Un nomm Anthoine QUI NE JURE tue ensuite ledit GOURDIN dĠun coup
dĠpe au cÏur et en blesse un autre.
Charles, etc, savoir faisons tous prsens et avenir,
nous avoir receu lĠumble supplicacion de Philippes CARPENTIER, labourier
nagaires demourant au villaige de Beauffort prochain et contigu la frontire
de France, contenant que ou mois de may lĠan XVC XXIIII par certain
jour de samedi, ledict supliant, Pierre de PENIN, Jehan PIERON, Anthoine QUI NE
JURE et autres dudict Beauffort, et du pays lĠenviron ou nombre de dix, entre
lesquelz estoit prsent deffunct Philippes GOURDIN, se partirent dudict
villaige de Beaufort o ilz se rfugioient comme en lieu fort, pour doubte des
ennemis, pou eulx venir rcrer au villaige de Noyelle Wyon, distant dudict
lieu de une petite lieue ou environ. Et estans sur le chemin, rurent la boulle
trois contre trois et eulx arrivez audict Noyelle, allrent disner ensemble au
cabaret de Mathieu LE ROUX, o ilz furent jusques environ trois heures aprs
midy, sans que entre eulx y olt quelque dbat, ne apparence dĠen y avoir. Auquel escot lesdicts
GOURDIN et Anthoine QUI NE JURE furent entrebeuz ou aucunement surprins de
boire. Et aprs disner, se partirent dudict cabaret et sĠen allrent devant
leszdicts Philippes GOURDIN, Anthoine QUI NE JURE, ung josne filz nomm
Flourens ASSELLIN et autres, tellement que ledict defunct Philippes GOURDIN se
coucha derrire une haye estant lĠissue dudict villaige de Noyelles,
attendans ledict supliant, Pierre DU PENIN dit Pelot et autres qui estoient
derrire lequelz les sievyrent tost aprs. Et veant ledict Pelot que ledict feu
GOURDIN ainsi couchi dormoit, contendant le resveillier et faire lever
desgaigna son estocq duquel il frappa pluiseurs cops du cop sur les jambes et
sur le corps dudict feu tellement quĠil le resveilla. Et sitost quĠil fut
resveilli se leva en disant ces motz : allement, allement, et aprs quĠil olt ce dit, desgaigna sa rapire
contre ledict de PENIN. Que lors ledict supliant, veant et entendant que ce
fust ici cause quĠilz crioient lĠun aprs lĠautre : haire, haire, comme ont de coustume faire compaignons de guerre,
se approcha de eulx desgaignant aussi son baston. Que lors ledict feu GOURDIN,
soy adreschant audict suppliant lancha pluiseurs foiz de son baston aprs luy,
comme feist pareillement icellui suppliant, aprs ledict feu, du sien,
contendant soy garandir des aggressions que lui faisoit icellui feu Philippes
GOURDIN, et rurent pluiseurs cops lĠun sur lĠautre. Mais icellui feu le
poursievoit si radement quĠil le contraindit de reculer contendant le
oultragier. Parquoy ledict supliant, se voyant et pour doubte que ledict feu ne
le tuast, requist ayde audict Anthoine QUI NE JURE disant : compre, me
laissera tu ici tuer. Enssuyant
laquelle requeste, ledict Anthoine se aprocha dudict feu GOURDIN et dĠun estocq
quĠil avoit, rua pluiseurs cops aprs icellui feu, et de lĠun dĠiceulx le
attaindit tout droit au cuer, duquel cop il tomba par terre et incontinent apr
morut sur le place. Auquel conflict ledict feu GOURDIN appela aussi en son ayde
Jehan PIERON son cousin, lequel il vint tout son espe nue, et fut navr tant
par ledict supliant que dudict Anthoine QUI NE JURE, sang courant et playe
ouverte, ou bras et au corps lĠendroit de la mamelle, desquelles bleschures
il a depuis est sav et gary.
Et jasoit que, ledict supliant nĠait donn le cop dont
ladicte mort sĠest ensievye, et quĠil en ait dsia fait satisfaction aux parties
intresses, nantmoins pour doubte et rvrence de justice, il nĠoseroit
hanter ne converser en noz pays et seigneuries, ains lĠen conviendra tenir
absent et vivre ailleurs en grant povret et misre, nĠest ne notre grace et
misricorde lui soit sur ce impartie, pour laquelle il nous a trs humblement
suppli et requis. (É)
Donn en notre ville de Bruxelles ou mois de novembre
lĠan de grace mil cincq cens vingt et cinq, et de nos rgnes assavoir, de
celluy des Romains et Germanie le VIIIe et de Castille le IXe ;
par lĠempereur en son conseil ; sign Verderue.
[radement = rapidement, violemment ; haire, haire
= au secours ! ; allement/aliement = alliance, lien ; donc allement,
allement = lĠaide !]