Anthoine LE GILLON, de Lens

(AD59, B1735, folio 48)

 

En 1523 ˆ Lens, Anthoine LE GILLON et Lanselot de LĠABBAYE boivent et mangent ensemble dans une taverne . Ils jouent ensuite ˆ un jeu de dŽs, et le premier gagne un patard que le second refuse de lui donner. SĠensuit une bagarre dans la rue, au cours de laquelle Lanselot est tuŽ dĠun coup de javeline.

 

Charles, scavoir faisons ˆ tous prŽsens et avenir, nous avoir receu lĠumble supplicacion de Anthoine LE GILLON, homme mariŽ chargiŽ de femme et pluiseurs enfans, demourant en notre ville de Lens en notre contŽ dĠArtois, contenant comme certain jour passŽ ledict supliant fut requis par feu lors vivant Lanselot de LĠABBAYE dit Luc, ˆ le compaionner ˆ boire ung pot de vin en certaine taverne en notredicte ville de Lens, ce que ledict supliant fist. Et aprez avoir beu certaine espace de temps et fait bonne chire, ledict suppliant fut requis dudict feu Lanselot de faire ung momon ˆ deux dez, ce que ledict suppliant lui accorda, et gaigna ledict momon qui valoit ung patart, et cuidant par ledict supliant prendre. Ledict patard fut retirŽ par ledict feu Lanselot, lequel fist refuz de bailler audict supliant. Quoy voiant par ledict supliant requist par pluiseurs foiz par belles parolles audict feu Lanselot quĠil lui vaulsist baillier son patart et quĠil le avoit gaignŽ, mais il fut refusant de ce faire. Au moyen de quoy, parolles se meurent entre ledict supliant et ledict Lanselot, lequel mist main ˆ son espŽe, jurant et dŽtestant le nom de Dieu, quĠil ne dŽlivroit ledict patart, monstrant semblant de vouloir oultragier ledict suppliant, et craindant estre vilonnŽ dudict Lanselot par ce quĠil nĠavoit espŽe ne baston pour soy deffendre, congnoissant ledict feu estre fort querelleux et dangereulx, sortit de ladicte chambre et taverne. Et estant parti dĠicelle, alla en sa maison, laquelle est prochaine de ladicte taverne, ne y a que la parois entre deux. Et aiant recordacion dĠinjure ˆ lui faite par ledict feu Lanselot pour demander le sien, meisment quĠil avoit estŽ contraint partir de la place non avoir povoir de rŽfrŽner son courroux. Et de chaulde colle prinst et saisist une javeline de barde et garny dĠicelle retourna vers ladicte taverne. Et estant venu en la court dĠicelle, ledict supliant perchut ledict Lanselot, lequel estoit sorti de ladicte taverne. Que lors ledict supliant se approcha de lui , en lui demandant se il estoit homme pour lui dire les parolles quĠil lui avoit dit et en rigoreulx parler lui dist quĠil lui dŽlivrast son patart, et quĠil nĠestoit homme pour lui emporter le sien. Au moyen desquelles parolles, ledict feu Lanselot mist main ˆ son espŽe, le daisgaigna et ledict supliant avalla sa javeline et dĠicelle frappa et lancha  aprez ledict feu, tellement que aprez pluiseurs copz ruez tant de lĠun que de lĠautre, ledict supliant attaindist ledict feu du fer de sa javeline et dĠun cop de taille sur la teste. Au moyen duquel cop ledict feu Lanselot cincq ou six jours aprez est terminŽ vie par mort.(É)

DonnŽ en notre ville de Malines le jour du Vendredi Saint ou mois de mars lĠan de grace mil cincq cens vingt et trois, et de noz rgnes assavoir de cellui des Romains et Hongrie le cincquiesme et des Espaignes le huitiesme ; par lĠempereur en son conseil.

 

[dŽtester = profŽrer des imprŽcations contre quelquĠun ; vilonner = rudoyer ; recordacion = souvenir ; barde = armure ; avaler sa javeline = abattre sa javeline]