Pierre DOUCHET, d’Avesnes-le-Comte

(AD59, B1698, folio 76v)

 

En 1476 à Avesnes-le-Comte, le curé Hue GROUEL séduit la femme de Pierre DOUCHET et a des relations charnelles ave elle, de jour comme de nuit. Pierre DOUCHET rencontre un soir ledit curé et croyant qu’il va encore chez lui, lui donne de colère quelques coups de dague aux cuisses. Faute de bons soins, et continuant à fréquenter les tavernes et manger de la viande le vendredi, le curé GROUEL meurt peu après.

 

Charles, etc, savoir faisons à tous présens et advenir, nous avoir receu l’umble supplicacion de Pierre DOUCHET, povre homme demourant en notre ville d’Avennes le Conte en notre conté d’Artois, contenant que ledict suppliant et sa femme se sont tousiours précédemment bien et honnestement conduitz et gouvernez vivans ensemble en bonne paix amour et concorde, et gardans continence et chasteté ainsi que mary et femme sont tenuz de faire, sans ce que ladite femme dudict suppliant ait eu renommée de soy autrement conduire ne gouverner que femme de bien et d’honneur ne doit faire, jusques à ce que feu ung nommé messire Hue GROUEL prestre en son vivant curé dudict lieu d’Avennes, par sa malice subtilité et cotelle, a tellement séduit ladicte femme dudict suppliant, quant elle aloit à confesse devers luy comme à son curé et pasteur, qu’il l’a mist hors de toute bonne voye, et tellement que finallement selon que la commune fame et renommée en a couru et court au pais, il a plusieurs foiz eu compaignie charnelle avec elle, dont ledict suppliant de ce adverty a esté moult scandalizé. Et néantmoins pour cuidier, rappaiser la chose au moins mal que faire se pourroit, il a plusieurs foiz dit et remonstré et fait dire et remonstrer audict feu messire curé qu’il se desportast de plus converser en sa maison ne en sa compaignie. Non obstant lesquelles remonstrances, ledict messire Hue a tousiours persévéré en sa perverse dampnable dissolucion, délit et meffait, en fréquentant tousiours en la maison d’icellui suppliant de jour et de nuyt. Et tellement que le XXVIIe jour de juillet dernier passé, ainsi que icellui suppliant venoit de soupper avec aucuns ouvriers qui reffectionoient et reffaisoient sa maison qui, par le fait de la guerre, avoit esté arcée et brûlée, avec plusieurs autres de ladicte ville, il rencontra ledict messire Hue qui venoit devers la maison dudict suppliant. Et lors icellui suppliant aiant mémoire des choses dessusdictes et cuidyt que ledict messire Hue venist encores de devers sadicte femme, de chaulde colle frappa icellui messire Hue d’un baston qu’il tenoit d’aventure en sa main, telleemnt qu’il le rua par terre. Et après tira sa dague de laquelle il luy donna quatre ou cinq cops le cuidant frapper ès cuysses, sans toutesvoyes avoir voulence de le tuer, mais seullement luy bailler occasion de non plus retourner en sa dicte maison, pour luy faire si grant honte blasme et vergongne, comme fait luy avoit paravant ainsy que dit est. Mais néantmoins après ce que ledict messire Hue, à cause desdictes playes et blesseures at gardé sa chambre environ quinze jours, et que le péril et dangier de mort, comme il sembloit, en estoit dehors et que mesmes il fréquentoit l’église aux heures de la messe et de vespres et aloit et venoit parmi la ville comme il avoit à coustume de faire paravant, pour ce que comme il fait à coustumer, il ne gardoit point sa bouche, ains fréquentoit les tavernes, mangeoit toutes viandes deffendues et ne vouloit croire ses cirurgiens et médecins, par son mauvais disssolut gouvernement et autrement, environ sept sepmaines après ladicte bature, il ala de vie à trespas. (…)

Donné en notre ville de Malines ou mois de novembre, l’an de grace mil IIIIC LXXVI, ainsi signé par monseigneur le Duc à la relacion du conseil.

 

[cautelle = stratagème, rouerie ; la commune = le peuple ; converser = fréquenter, séjourner ; arcé = incendié ; vergongne : honte ; coustumer = avoir l’habitude]