Pierre CARBONNIER, ˆ Arras

(AD59, B1735, folio 118v)

 

En aožt 1524 en la taverne Çla Danse du LivreÈ ˆ Arras, Pierre CARBONNIER homme dĠarmes, d”ne en compagnie de Jehennet HAIRY, Jehennet de GRINCOURT et quelques autres compagnons de guerre dont Philippe du RIEZ. A un moment donnŽ ce dernier propose ˆ Pierre CARBONNIER dĠŽchanger un cheval appartenant audit Pierre contre Ç8 livres de gros et un cheval courtaudÈ. Il refuse et dit quĠil pourrait en avoir plus de 12 livres de gros, et quĠil peut encore le nourrir, en exhibant deux ou trois pices dĠor. Philippe du RIEZ saisit lĠune dĠelles : Çun demi noble dĠor HenricusÈ et, la plie entre ses dents et la casse. Ledit CARBONNIER donne alors ˆ lĠh™tesse Çun angelot dĠorÈ pour payer son Žcot. SĠensuit inŽvitablement une querelle, tant ˆ propos de la tractation qui a ŽchouŽ, que de la pice brisŽe. LĠexcs de vin aidant, une rixe Žclate. Philippe du RIEZ blesse Pierre CARBONNIER dĠun coup dĠŽpŽe qui lĠabat par terre. Peu aprs il se relve, tous se retrouvent hors de la taverne, mais nul ne se calme. Au cours dĠun nouveau combat, Pierre CARBONNIER blesse mortellement Jehennet HAIRY et Jehennet de GRINCOURT ˆ coups dĠŽpŽe.

 

Charles, etc, savoir faisons ˆ tous prŽsens et avenir, nous avoir receu lĠumble supplicacion de Pierre CARBONNIER, homme dĠarmes soubz la charge et conduite du sŽneschal de Haynnau, contenant comme le Ve jour dĠaoust dernier passŽ, Philippe du RIEZ dit Vert Censier, Jehennet de LE PORTE, Jehennet HAIRY dit Moullart, Jehennet de GRINCOURT mannier de Wailly, et autres tous compaignons de guerre, se dŽlibŽrrent dĠaller disner ensemnle en la taverne de La Danse du Livre, situŽe sur le petit marchiŽ de notre ville dĠArras, o promist venir Philippe MASECLER. Et aprs quĠilz olrent fait bonne chire ensemble, y survint environ la fin de lĠescot ledict MASECLER qui se assoist ˆ table avec eulx. Et pendant quĠilz buvoient ledict Philippe et aucuns de la table dirent audict supliant, que sĠil vouloit vendre ou Žchanger lĠun de ses chevaulx, que ledict Philippe Žtoit venu pour ce faire, et lui feist offre de huit livres de gros avec ung cheval courtau, mais ne se sceurent accorder ensemble.Combien que ledict Vert Censier, MASECLER et ceulx de la table disoient tousiours que cĠestoit assez et que jamais il nĠen auroit autant. A quoy ledict supliant respondit que si le cheval ne leur duisoit que on lui laissast, et en cet instant se leva de table en disant par forme de gaignie que sy, et quĠil en auroit plus de douze livres de gros, et que quant il ne le venderoit, quĠil avoit encoires deux ou trois pices dĠor pour les gouverner. LĠune desquelles pices qui estoit un demy noble dĠor Henricus il getta sur le buffet de lĠostesse de ladicte taverne, que print ledict Vert Censier et le ploya et tourna aux dens ˆ son plaisir, dont ledict suppliant se dŽmonstroit estre malcontent, combien que ledict Vert Censier qui avoit rompu ladicte pice se offroit dĠen rendre une pareille ou la valeur dĠicelle. Aprez toutesvoyes que ledict suppliant avoit laissiŽ ˆ lĠostesse ung angelot pour y prendre son escot, et quĠilz furent rassis ˆ table, o ilz beurent derechief tousiours prŽtendans avoir ledict cheval pour le prix que dessuz, ˆ quoy ledict supliant ne se vouloit aucunement condescendre. Pour lesquelles causes et autres parolles haultaines quĠilz olrent ensemble, tant ˆ raison de ladicte pice dĠor et choses dessusdictes comme de leurs cappitaines, et que ledict supliant lui dit quĠil estoit homme pour ledict Vert Censier aussi bien que avoient estŽ les COURCOL et autres, ilz desgaingnrent leurs espŽes mais ledict Vert Censier frappa le premier de sondict espŽe sur icellui supliant, lequel fut bleschiŽ ˆ playe ouverte et sang courant, tellement que lĠun des cops quĠil olt sur la teste il fut abatu par terre, et nĠeuisssent estŽ les assistens qui y mettoient le bien, en quoy faisant aucuns furent bleschiez, ledict Vert Censier assistŽ de Collart du RIEZ son oncle eust tuŽ ledict supliant. Et aprez quĠilz olrent ce fait, se partirent de ladicte taverne et laissrent ledict supliant comme mort.

Et soubit que ledict supliant qui estoit tout estonnŽ desdicts coups fut relevŽ, et pensant trouver lesdicts du RIEZ hors de ladicte taverne, tant par force que prire et autrement, trouva moyen avoir son corps et espŽe ˆ dŽlivrer que tenoient lesdicts Jehennet MOULLART, MASECLER, de LE PORTE, le mannier dessusdict et autres, ausquelz ledict supliant dit quĠil ne falloit point tant de gens sur ung homme. Et incontinent wida ledict suppliant hors ladicte taverne, mais il fut poursuy par lesdicts de LE PORTE et MOULLART pour tousiours le tenir, et cuidant par lui supliant quĠilz ne lui vaulsissent aucun mal de son corps, par ce que ledict Jennet MOULLART disoit ces mots en jurant : cet homme icy nous tuera il tous ? Icellui supliant lequel estoit esmeu et sousprins de vin, se mist ˆ frapper aprs eulx, tellement que assez prez de ladicte taverne, ledict Jehennet HAIRY dit Moullart rechut aucuns cops dĠestocq au bras, et pareillement fut oudict dŽbat icellui mannier de Wailli navrŽ au travers du bras, ˆ raison desquelz cops, par faulte de bon appareil gouvernement mŽdecin ou autrement, il convint trois ou quatre jours enssivant soyer et copper audict Jehennet MOULLART le bras, pour le feu qui si estoit bouttŽ, le lendemain termina vie par mort, combien que quatre jours auparavant ladicte blessure ledict Jehennet MOULLART avoit receu ung cop de lanche par les Franois ou mesme bras, lequel nĠestoit encoires sanŽ et gary. Et quant audict Jehennet GRINCOURT mannier de Wailly, pour ce quĠil ne tenoitcompte de ladicte blessure, allant de villaige en villaige faisant courses et autres choses, comme tousiours il avoit fait auparavant, icelle blessure, il termina aussi vie par mort trois sepmaines aprez. (É). DonnŽ en notre ville de malines ou mois dĠoctobre lĠan de grace mil cincq cens vingt et quatre, et de noz rgnes assavoir des romains et Hongrie le septiesme et des Espaignes le neufiesme ; par lĠempereur en son conseil ; signŽ Verderue.

 

[cheval courtaud = cheval ˆ jambes courtes ; duire = convenir ; noble, angelot = nom de monnaies dĠor circulant en Flandre, France, Angleterre, il se peut que le noble Henricus et lĠangelot dont il est question ici soient des monnaies frappŽes par Henry VI roi de France et dĠAngleterre ; soubit que = aussit™t que ; se bouter = commencer ; saner = panser]